Ceux d’entre vous qui me suivent sur Instagram savent déjà quelle « tuile » m’est tombée sur le coin du nez : mon jardin a été détruit (c’est vraiment le mot) par un orage de grêle.
Oh bien sûr, j’en ai vu des grêles dans ma vie de jardinier ! Des plus ou moins sévères… mais celle-ci était, de très loin, vraiment la pire.
Les grêlons n’étaient pourtant pas énormes (à peu près la taille d’une cerise). Ce qui a fait de si grands dégâts c’est la violence avec laquelle ils ont fouetté les plantes (un voisin nous a parlé de tornade, mais nous étions sur la route quand cela est arrivé donc je ne l’ai pas vue de mes propres yeux), mais aussi la quantité tombée au sol -plus de 5cm !- ce qui a littéralement tout aplati et cassé.
C’était un 29 mai, et je venais juste de terminer les semis et plantations des 35 planches de potager. Après tant de travail intense (mais joyeux ;)) au jardin depuis mi-mars, je dormais enfin depuis quelques jours sur mes deux oreilles avec la satisfaction de me dire « Ouf, tout est en place, mes bébés n’ont plus qu’à se développer » (si vous êtes jardinier, je suis sûre que vous me comprenez ;)).
Et bam…
Sur le moment, j’avoue avoir accusé un bon choc. C’est idiot parce qu’après tout ce n’est « que » un jardin et pourtant je me suis mise à trembler, j’avais mal au ventre, des vertiges… ça ne se contrôle pas. Encore en tenue d’été (il avait fait si chaud dans la journée !) je grelottais littéralement, mes tennis dérapaient sur cet épais tapis de grêlons, cela avait quelque d’irréaliste. J’ai tout de suite compris que les dégâts seraient sans appel : de mes tomates (qui portaient déjà beaucoup de fleurs et de petits fruits), blettes, pommes de terre, pois gourmands, courgettes, laitues, etc. il ne restait que quelques tiges cassées, totalement déplumées. Et le feuillage était haché au sol tel un pesto géant (y compris les plants d’aubergines « très spéciales » que je chouchoutais sur la fenêtre de ma chambre depuis février ^^)…

Heureusement, cela est arrivé à un moment où j’étais totalement surmenée côté professionnel. Je dis « heureusement », car cela a eu une conséquence imprévue : sentant bien que j’étais beaucoup trop fatiguée pour trop m’appesantir sur cette calamité, j’ai décidé de ne plus retourner au jardin. Plus du tout.
Le premier matin après cette tempête, j’ai été réveillée par un petit rayon de soleil et ma première réaction a été de penser « chouette, encore une belle journée ! ». Et puis paf, j’ai repris conscience de la réalité et oui, j’avais beau me dire « ce ne sont QUE des fleurs et des légumes », j’ai quand-même senti un petit pincement au coeur.
Si j’avais été plus en forme j’aurais couru au jardin pour tailler, nettoyer, panser les blessures, pulvériser à la prêle histoire d’enrayer toute maladie cryptogamique. Mais rien que cette idée me faisait trop de mal, je n’étais pas en état de me lancer dans une telle bataille. Alors j’ai été une bien mauvaise permacultrice ; j’ai « abandonné » mon jardin à lui-même.
Il m’a fallu 10 jours pour trouver le courage de retourner faire un petit bilan. Entre temps, j’étais juste sortie dans la cour le matin avec une tasse de café, profiter des roses qui avaient été un peu protégées par la maison. C’était déjà bien consolant, surtout avec le chant délicieux des petites fauvettes à tête noire qui habitent chez moi depuis que des « fadas » ont coupé les vieux merisiers de l’autre côté de la route…
Et finalement… j’ai bien fait d’attendre.
Déjà, cela m’a laissé le temps de gagner un peu en détachement.
Et puis cela m’a permis de voir que même sans mon aide, certaines plantes avaient su trouver bien plus de ressource que je ne me l’étais imaginé. Le mot « résilience » commence à m’agacer depuis que tout le monde l’utilise à tort et à travers mais là, c’est pourtant bien le terme adéquat. Malgré les pluies qui ont suivi cette tempête, aucune maladie ne s’était développée : ni mildiou sur les tomates ou pommes de terre pourtant si blessées, ni oïdium sur les courgettes ou les concombres totalement défoncées.
Il m’a ensuite fallu quelques jours pour tout nettoyer et replanter, en ne m’y mettant que quelques heures le soir car toute la journée était prise par le travail. Trois de mes filles m’y ont aidé au moindre temps libre, ce sont des amours. Mon époux aussi m’a beaucoup épaulée car depuis mars, j’ai mal à un bras (la loose, décidément ^^) et même porter un arrosoir me donne l’impression que l’articulation du coude va céder comme quand on découpe un poulet ^^.

Au final, maintenant que vous avez eu la patience de lire tous mes états d’âmes hautement existentiels et totalement inutiles ^^ (désolée, fallait que ça sorte) voici ce que je retiens de cette leçon :
- Après qu’une grêle ait vraiment tout dévasté, le plus urgent à faire est peut-être… de ne rien faire ! Car il est impossible sur le moment de savoir quels plantes ou légumes vont réussir à se relever de l’épreuve. Et l’on pourrait arracher ou couper à mauvais escient.
- Il aurait été toutefois bien plus prudent de tout traiter à la prêle, voire même avec quelque chose d’un peu plus « costaud » les légumes à risques (courgettes, concombres, tomates…). Là j’ai eu du bol, mais je pense que mon sol riche en silice (je l’amende à la poudre de basalte depuis 4 ans) y est pour beaucoup.
- Les deux gros arbres (cerisier dans le potager 1, pommier « Reinette » dans le potager 2) ont pris cher les pauvres (comme tous les fruitiers du jardin) mais c’est grâce à eux que l’on a pu continuer à manger des légumes : ils ont très efficacement protégé les rangs qui avaient la chance d’être abrités sous leur ramure. Cela me conforte dans mon amour des arbres fruitiers au potager (j’y reviendrai un jour, dans un autre article).
- La serre a tenu le coup ! Dessous, on a des centaines de promesses de tomates…
- Mes plants en pépinière ont été un peu secoués, mais moins que le potager. Comme les rosiers de la cour, ils ont été protégés par la maison car les bourrasques de grêle venaient du nord.
- Les limaces ont été très occupées à bouloter tous les feuillages abîmés. Du coup, elles ont laissé tranquilles les légumes replantés entre temps 😉
- Moi qui pensais devoir acheter des légumes suite à cette tempête… en fait, je me suis précipitée pour acheter quelques fenouils et carottes chez un producteur du coin, et puis ils ont failli pourrir à la cave car entre les fèves, les pommes de terre nouvelles, l’aillet, les cebettes, les quelques salades restantes, les pois gourmands, les premières carottes, les artichauts, et maintenant les courgettes qui prennent le relais, on s’en est très bien sortis ! Ce n’est certes pas autant l’abondance que les autres mois de juin, mais pour 5 personnes, c’est suffisant. Je suis tellement reconnaissante pour cela…
Dans le détail :
- Les courgettes : j’ai bien fait de ne pas les arracher. Car sur le moment, leur feuillage semblait détruit à 90% mais le peu qu’il en restait a suffit à assurer la photosynthèse. Le système racinaire étant suffisamment développé, les pieds ont donc émis très vite plein de nouvelles feuilles, puis des fleurs et même des fruits (on mange des courgettes depuis quelque jours ;)). Cela n’aurait pas été le cas si je les avais arrachés pour replanter des jeunes godets achetés en pépinière.
- Les tomates : il n’en restait que des tiges, et encore, totalement martelées et blessées. Je n’aurais pas parié un kopek sur elles et pourtant ! Là aussi, le système racinaire déjà bien développé a permis aux tomates d’émettre de nombreuses nouvelles pousses, mais pas encore de fleurs. On va voir ce que ça donnera dans l’été…
- Les pois gourmands totalement couchés au sol ont donné malgré tout plusieurs récoltes, mais moins que d’habitude. J’ai dû rapidement les arracher (ils jaunissaient), et à l’heure actuelle il ne nous reste que le rang abrité sous le cerisier. Heureusement que cette année nous ne sommes plus que 5 à table ^^
- Les carottes, les cébettes et l’aillet ont dit d’un air étonné : « Une grêle, quelle grêle ? Ah, il y a eu une grêle ? ». Sur leurs feuillages il n’y a quasiment eu aucun dégât, c’est curieux… les veinards !
- Les salades en revanche ont été détruites comme si une chèvre géante avait tout brouté à même le sol… excepté les quelques chançardes abritées sous les arbres. Ça fait un peu râler, elles étaient si belles ! Enfin, pour voir le bon côté des choses : elles auront au moins eu l’honneur de servir d’engrais vert.
- Les choux sont bien moches. Ceux qui étaient trop minables (les « borgnes ») ont été remplacés, et ceux pour qui je n’avais plus de candidat-remplaçant sur le banc de touche de ma pépinière sont priés de se de**erder avec les trois toupets de feuilles en dentelle qu’il leur reste ^^.
- Les pommes de terre : elles étaient minables après la grêle, mais ont refait tout leur feuillage entre temps (sans même développer de mildiou !). Elles sont un peu avachies sur les rangs voisins, mais dessous les patates sont excellentes et on s’en met plein la cravate depuis 3 semaines ! C’est pratique, le persil est déjà haché ^^.
- Les poivrons ont perdu toutes leurs fleurs, la majorité de leurs feuilles, mais sont bien repartis malgré tout. Là aussi il aurait été dommage de les arracher car au final ils vont juste prendre un peu de retard, mais moins que si j’étais repartie à zéro avec des plants achetés dans le commerce.
- Les concombres se sont vraiment fait dé-fon-cer la tronche. J’ai donc voulu les changer mais en pépinière, on m’a expliqué que mi-juin ce n’était plus la saison… Ah. Bon, ben du coup je les ai laissés comme ils étaient. De leur moignon raplapla il émettent péniblement quelques pathétiques nouvelles tiges, on verra bien.
- Les fèves ont perdu leurs feuilles mais en revanche les gousses (prêtent à manger) ont tenu le coup. On s’est régalés sur plusieurs repas !
- Les plants d’aubergines « spéciales » (les « petits putois de la fenêtre », pour ceux qui ont suivi ;)) ont été remplacés grâce à un de mes fils : je lui en avait offert en grandes pompes courant mai pour le jardin de sa fiancée, et il a eu la grande gentillesse de me les ramener. Sur le coup j’avais un peu honte quand-même…
- Les artichauts sont pitoyables (esthétiquement parlant), mais ont réussi à produire malgré tout beaucoup de belles capitules : là aussi, on se régale.
Enfin voilà, je me retrouve avec un jardin étonnement « épuré » pour un mois de juin, mais depuis quelques jours je peux y retourner avec autant de plaisir qu’avant la catastrophe. La page est tournée…








Quel joli blog, de magnifiques photos, merci pour tout !
Nathalie
Avec plaisir Nathalie 🙂
C’est moi qui vous remercie pour ce gentil message !